Heros Perdu Acte II
ACTE II SCENE I Une rue du royaume, magnifique. Un mendiant est à terre, épuisé, affamé, adossé contre une porte d'un bâtiment particulièrement élégant. Le Héros et la Mort arrivent dans la rue sans voir le mendiant qui est caché par le perron. C'est l'après midi. Le Héros: Fantastique pays! Splendide empire! La Mort : Et oui! Ici, grâce au seigneur, la beauté éblouit! Le Héros: Vous aviez tout à fait raison! La Mort : Ah? Le Héros: La plastique De votre citadelle est vraiment féerique! Tous ces monuments, tous ces ponts sont merveilleux! L'école pour apprendre à compter, fabuleux! La Mort : Il faut que les enfants sachent manier l'argent. Le Héros: Ce centre de loisirs où vont, heureux, ces gens, Quelle idée! Quel spectacle! La Mort : Il faut bien les aider A se détendre un peu de leurs dures journées... (A part) Et éviter qui'ils ne viennent à réfléchir. On ne sait jamais! La révolte peut murir. Le Héros: Et l'art! La Mort : Toute cette énergie en pure perte Brulée! Le Héros: Cette salle d'exposition ouverte Où tous les créateurs peuvent s'y rencontrer! La Mort : (A part) Elle permet aussi de mieux les contrôler. Le Héros: L'architecture aussi semble favorisée... Ce bâtiment est exemplaire en nouveauté! Ses lignes folles font sûrement des envieux! Admirez son toit, ses murs, sa porte... Mon Dieu! Mais quel est ce mendiant? La Mort : Hein? Que fait il ici? Gardes! Gardes! Mais où sont ils? Le Héros: Pourquoi ces cris? La Mort : Euh... c'est à dire... Qu'il faut lui porter secours... Le Héros: Quelle horreur, non? La Mort : Ah! Que n'ai je fait un détour... Le Héros: Voyez sa peau tendue sur ses os. Il a faim. La Mort : Mais que font ils? Le Héros: Il faut le sauver! La Mort : ( Les gardes sont accourus.) Ah enfin! Hélas... On va l'aider. Gardes, nourrissez-le! Le Héros: Il faudrait le soigner! La Mort : Oui, bien sur. Soignez le! Le Héros: Et l'habiller! La Mort : Mais, c'est à dire... Obéissez! 1 Garde : Vous dites? 2 Garde : Le nourrir? 1 Garde : Le soigner? 2 Garde : L'habiller? Le Héros: Bien sur, pardis! Ne vous inspire-t'il donc pas La pitié, la bonté? 1 Garde : Quoi? La Mort : ...Ne discutez pas! 1 Garde : Bon, ben! On obéit! 2 Garde : C'est y pas malheureux! ( Les gardes le soulèvent et l'emportent vers le palais.) SCENE II Le Héros: Pourrait on l'inviter pour ce soir? La Mort : Ce pouilleux!? Le Héros: Quoi? Pouilleux? Un humain!? La Mort : Mes mots m'ont dépassés! Je ne voulais pas... Non! Le Héros: Pourquoi vous emporter! La Mort : Je ne m'emporte pas mais je pense qu'il faudrait Oublier cette idée! Le Héros: L'inviter? La Mort : Tout à fait! Le Héros: Pour quelles raisons? La Mort : Ce ne serait pas sa place! Le Héros: Pas sa place!? La Mort : Le prends pas mal! Le Héros: Je suis de glace! La Mort : Enfin... Le Héros: Non! Plus un mot! Je commence à voir clair! En fait de beauté, seuls les murs sont recouverts De cette patine bleue qui fait illusion! Oui, je découvre enfin toute cette fiction Que vous plaquiez devant mes yeux. Et de se rompre! Je découvre son vrai visage! La Mort : Tu te trompes... Le Héros: Non, non! Il est vrai qu'on ne peut faire passer La misère noire pour la félicité! La Mort : Mais enfin? Le Héros: Je ne vous entends pas! La Mort : La balade... Le Héros: Je vous prie de laisser ici la promenade! La Mort : Laisse moi donc t'entretenir à ce sujet! Ceci n'est pas faute de notre Majesté. Le Héros: Ah oui? Et de qui donc? Est ce la Lune pâle? Est-ce ce Soleil vif? Peut être vous, Camarde? La Mort : Non, il s'agit de la Princesse détrônée Le Héros: Que me chantez vous là? La Mort : Rien que la vérité! Le Héros: Je la connais votre vérité! La Mort : Quelle est elle? Le Héros: Vous le savez très bien! La Mort : Ah? Le Héros: Elle est sous tutelle! Au plus offrant, elle se vend totalement! La Mort : Ecoute la avant de rendre jugement! Le Héros: Soit! Que vouliez vous me conter? La Mort : Sa trahison!( Silence.) Elle trahit son peuple en lui infligeant, honte!, Cette déperdition qu'est une rébellion! Ainsi nous contraint elle à cette répression! Le Héros: Dites plutôt qu'elle soutient ces gens martyrs Contre cette oppression aveugle de l'Empire, Une Infamie! La Mort : Maîtrise toi! Le Héros: Nenni! Jamais! La Mort : Allons! Le Héros: Non, jamais je ne me maîtriserai Face à un dictateur! La Mort : Tu dépasses les bornes! Pour bien moins que cela, Capital emprisonne! Même toi, son hôte! Réfléchis bien! Le Héros: C'est ça! La Mort : Réfléchis encore! Tu le regretteras! Je te laisse jusqu'à ce soir pour y penser! Tu peux être riche! Le Héros: Non merci! La Mort : Acclamé! Le Héros: Sans façon! La Mort : Vivre dans le faste! Le Héros: Que nenni! La Mort : Entouré et aimé! Adulé! Le Héros: Non, j'ai dit! Je ne veux pas de ces acclamations légères Que l'on prête aux hommes de vertu adultère! Que me sembleraient les honneurs des dictatures En face de ces morts au regard incrédule! Merci! Très peu pour moi! Ce serait une insulte A tous ces gens qui n'ont comme espoir que la lutte! La Mort : Fais comme il te plaira! Tu as jusqu'à ce soir! Je te laisse y pensez. Ton bras contre ta gloire! Le Héros: Jamais! Allez! Adieu! SCENE III La Mort sort et Sylvain arrive dans le dos du Héros. La ville semble laide Une fois découvert ses coins cachés! Si laide! Ah, jamais je n'aurais pensé ce matin même Trouver dans ce luxe un tel visage blême. Sylvain : Qu'y a t'il d'horrible pour te voir de la sorte? Le Héros: J'ai vu le malheur adossé à cette porte, En la personne d'un mendiant emmené Par la garde vers quelques coins de la cité! Sylvain : Tes yeux se sont ouverts sur la réalité! Le Héros: Certes! Hélas, je n'en suis pas réconforté! Sylvain : Le regard du sage comme pour le poète Est douloureux face à la vie sans ses paillettes! Le Héros: Comment un amoureux des arts tel Capital Peut être l'auteur de cette scène infernale? Sylvain : C'est que de l'art, il n'a gardé que la durée. Il a oublié où se situe la Beauté. Le Héros: Faut il qu'il n'est pas de coeur? Sylvain : Il a le pouvoir! Le Héros: C'est à dire? Sylvain : Qu'il a préféré à Mozart Le son cristallin des deniers de son devoir; Aux toiles du peintre le plus génial, ses cadres. Le Héros: Mais malmener ainsi son peuple travailleur? Comment a-t'il pu en venir à la terreur? Sylvain : Lorsque les arts sont de cette sorte ignorés, Tous les poètes sont vifs à se révolter. S'en suit alors que l'artiste en sort muselé. Ce qui jadis, n'avait jamais lieu d'exister. Le Héros: Mais que s'est il passé? Sylvain : Notre Roi était bon. Le pays était riche et les auteurs féconds. Certains ont eu peur que ce ne soit passager. Ils ont donc décidé, tous, d'économiser. C'est à partir de ce jour que sont apparus Capital et sa fille Avarice en nos rues. Ils ont proposé à nos bons concitoyens Leurs chers services de banquier! Plus de moyen, Plus de mécénat! Or, pas d'acteur sans carrière! Comme tout le monde protégeait ses arrières, Le Théâtre tomba dans l'oubli le plus noir. La créativité disparu sans espoir. Et le malheur frappa un coup sourd à nos portes. SCENE IV A ses mots, la Princesse arrive et s'approche entourée de quelques gardes du corps. Le Héros: Ah? Sylvain : Quelqu'un... Le Héros: Qui? Sylvain : Quelqu'une... Le Héros: Mais qui? Sylvain : Oh, qu'importe! C'est la Mort! Le Héros: Quoi? Sylvain : On ne sait comment, mais le Roi Fut trouvé décédé. Lors débuta l'effroi! Le Héros: Mais que vient faire ici la Mort? La Reine: Elle est coupable! Sylvain : ( L'apercevant.)Majesté! Le Héros: Vous dites? Sylvain : La Princesse! Le Héros:( A part.) Incroyable... Sylvain : Nous parlions du passé... La Reine: Je sais. Sombre sujet! Le Héros: Vous accusiez la Mort... A-t'elle était jugée? Sylvain : Nous avons essayé de la faire enfermer. Mais jamais nous n'avons pu, las! la condamner, Un coup de théâtre est arrivé au procès: Capital a fourni un alibi parfait! Le Héros: Ah? Lequel? La Reine: Une nuit avec ce mécréant! Le reste est affaire de sournois boniment! Sylvain : Le gredin Capital s'est emparé des sceaux Avec l'aide de la Mort et de généraux... Il nous a imposé sa sombre cruauté. La Reine: Et maintenant, il ne veut que m'éliminer. Le Héros: Mais pourquoi? La Reine: Je représente l'opposition. Le Héros: Ah oui! Elle m'en a parlé: La Rébellion! Sylvain : Non! Je la nommerais plutôt La Tradition! Le Héros: La Mort m'a fait comprendre quelle est la raison De ce faste pour moi. Ils espèrent mon poing... Sylvain : Et...? Le Héros: Il vous est acquis! Je ne serai témoin D'aucune tyrannie! Je hais le despotisme! Sylvain : Jusqu'où pourrait aller ton fougueux héroïsme? Le Héros: Commandez! Je serai votre bras milicé! La Reine: As tu confiance en cet homme révolté? Sylvain : Les yeux fermés! Le Héros: Pourrais-je... ? La Reine : Vous pouvez m'aider! Suivez nous! Le Héros: Où? La Reine: Il nous faut parler en secret! La Princesse, Sylvain et le Héros partent donc du côté par où étaient venus la Mort, le Héros, la Princesse, Sylvain; soit du côté opposé par où sont venus les gardes et repartis avec le mendiant, ainsi que la Mort. Rideau.
|